Janvier
Un ancien élève mort au champ d'honneur.
Voici
qui fait le plus grand honneur à notre École d’enfants de troupe :
Chassignol,
sergent au 23e RI, ancien élève de l'École militaire, âgé de 17 ans,
placé sur sa demande dans un groupe franc, s'est vite fait remarqué par son
intelligence, son brillant courage et son sang-froid. Cerné par l'ennemi
pendant une reconnaissance, s'est défendu vaillamment et n'a succombé qu'après
avoir vendu chèrement sa vie. Son corps, repris par ses camarades, à proximité
des tranchées ennemies, a été trouvé enveloppé sous sa capote, dans les plis
d'un drapeau tricolore.
L ‘élève Chassignol s’était engagé dès le mois de
septembre, alors qu’il était dans sa famille.
Février
Un ancien officier instructeur de l'École
militaire à l'honneur.
M.
Besse, ancien cadre de l'École militaire est promu à titre définitif au grade
de capitaine. Après avoir pris part à plusieurs combats en Lorraine et en être
sorti sauf, il reçut en août dernier une balle à la tête, alors qu'il
conduisait sa compagnie à l'assaut. Bien que non complètement remis il demande
à reprendre sa place dans le rang.
En
novembre, au cours d'une attaque de nuit ayant pour objet de s'emparer de
tranchées ennemies sur les bords du canal de l'Yser, le capitaine Besse, qui
commandait la compagnie d'avant-garde du bataillon, contribua efficacement par
son énergie morale et son exemple au succès de cette affaire, au cours de
laquelle les ennemis furent rejetés de l'autre côté du canal.
On
peut donc dire que c'est à la pointe de l'épée que M. Besse a obtenu son
troisième galon. Ce sympathique officier continue à montrer toujours le calme,
la bonne humeur et cette bravoure personnelle qui donne à son commandement une
exceptionnelle autorité.
Mars
Des promotions méritées.
Le 3
mars, l'Impartial rend compte des promotions parues au Journal
Officiel :
M.
Vayre, ancien lieutenant-trésorier de l'École au grade de capitaine ;
Le
lieutenant-colonel Desplats est promu définitivement à ce grade.
Compte
rendu en annexe.
Les derniers arrivants.
Les
menaces allemandes se précisant sur la région parisienne, les élèves de la 1ere
compagnie de l'École militaire préparatoire de Rambouillet viennent se réfugier
à l'École militaire des Andelys le 1er mars. Ils rejoignent ainsi
les élèves de Montreuil sur mer.
Les
logements de l'École sont utilisés à leur optimum. Il n'est donc pas question
d'accepter de nouveaux occupants, a fortiori des soldats comme cela semble
avoir été envisagé.
Les
Andelys deviennent un centre d'instruction.
… des soldats chaleureusement accueillis ...
qui s'entraînent pour chasser les barbares de notre chère France.
Lire
le compte rendu en annexe.
Décès du Lieutenant-colonel Desplat,
ancien commandant de l'École militaire.
Ce
décès qui remonte au 28 février, fait l'objet d'un compte-rendu mis en annexe.
Un insoumis.
Un
ancien maître d'armes de l'École, Victor Capon, ayant professé des doctrines
anarchistes à sa rentrée dans la vie civile, vient d'être condamné à cinq ans
d'emprisonnement par le 3e conseil de guerre de Paris. Pour sa
défense, cet ami des bandes de Bonnot et Garnier, a prétendu que ses opinions
lui interdisaient de payer sa dette envers la Partie.
Le
journaliste d'écrire : " C'est on ne peut plus commode. Mais heureusement
les gendarmes veillent."
Des décorations pour des anciens de
l'école.
Le
capitaine Schilizzi, ancien cadre de l'École, capitaine au 146e RI
est cité dans l'ordre de la Légion d'honneur.
Même pendant la guerre, les études continuent.
Les
résultats aux examens du certificat d'études primaires supérieures sont
considérés comme excellents : 27 admis sur 30 présentés. Ces résultats font
l'objet d'une attention particulière du ministère de la Guerre qui s'empresse
d'adresser un télégramme de félicitations au commandant Bourdot :
"
Le Ministre a appris avec plaisir les beaux succès obtenus par notre École aux
examens du CEPS. Il exprime sa satisfaction aux commandant, maîtres et
élèves."
Avril
Une affiche à apposer.
“ Défense
de prononcer ici aucune parole de découragement, de lassitude, de critique ou
de tenir des propos de nature à affaiblir l'énergie patriotique et la confiance
absolue dans nos chefs et dans nos Alliés.”
Cette
affiche est à apposer dans les bureaux, magasins et réfectoires, à l'initiative
de l'Impartial, suite aux désirs de nombreux lecteurs.
Juin
Quand finira la guerre.
Des
mathématiciens ont trouvé le moyen de fixer la date à laquelle prendront fin
les hostilités :
"
Prenez, disent-ils, les dates des trois guerres franco-allemandes. Chacune
d'elles a chevauché sur l'espace de deux ans. Additionnez 1814 et 1815 ; cela
donne 3629. Additionnez maintenant 2 à 2 les chiffres de ce total : 3 et 6
donnent 9 et 2 et 9 donnent 11, autrement dit le 9 novembre ; c'est en effet la
date du traité de Paris.
Faîtes
de même pour la guerre suivante 1870 et 1971 : 1870 et 1871 donnent 3741, 2 à 2
cela donne 3 et 7 qui donne 10 et 4 et 1 qui donne 5, soit le 10 mai, date du
traité de Francfort.
Pour
la guerre actuelle 1914 et 1915, les mêmes calculs donnent le 11 novembre, date
du traité de demain.
Il est
vrai que cela ne donne pas l'année, mais quand même....
Juillet
Des nouvelles du commandant Desplat.
Une
promotion au grade de lieutenant-colonel bien méritée. " Depuis plus de
cinq mois, le commandant Desplat est en plein feu dans les forêts de l'Argonne,
où il n' a cessé de déployer les plus
brillantes qualités d'un chef de guerre, ainsi qu'en font foi les citations
glorieuses dont il a été l'objet, en récompense de ses éminents services, le
généralissime vient de le nommer lieutenant-colonel et de le placer à la tête
de son régiment, dont le colonel a été mis hors de combat.
Cette
promotion n'est pas faite pour nous surprendre, non plus que tous ceux qui
l'ont vu à l'oeuvre pendant les quelques mois qu'il fût à la tête de notre École
d'enfants de troupe ; rarement école militaire eut à sa tête un chef aussi
entraînant, aussi persuasif, actif, énergique, alerte et ardent ; travailleur
infatigable, prêchant d'exemple, il obtenait de ses élèves, de ses subordonnés
et de ses collaborateurs ce qu'il voulait ; c'est lui qui apprit à nos enfants
de troupe, à donner à leur salut militaire un cachet d'élégance et de fierté
bien française.
Que de
belles revues, il donna au public andelysien ! Les vieillards et les malades de
l'hôpital hospice, eux-mêmes, n'ont pas oublié les bonnes séances musicales
qu'ils doivent à la délicate attention du commandant Desplats.
Août
Un nouveau commandant pour l'École.
Le
chef de bataillon Gay, du 128e RI, amputé d'un bras à la suite d'une
blessure de guerre est nommé commandant des deux écoles de Montreuil sur Mer et
des Andelys. Le chef de bataillon Bourdot, peut-être grâce aux bons résultats
scolaires obtenus sous son commandement, est affecté aux services spéciaux du
territoire du gouverneur militaire de Paris.
Des maraudeurs.
Depuis
quelques temps le personnel de l'École militaire s'apercevait que des
maraudeurs venaient ramasser, au champ de tir de Paix, les débris de balles, de
cuivre et de plomb provenant des tirs ; les enfants de B et D des Capucins,
dont les parents s'empressaient de vendre le produit de ces vols aux
brocanteurs et chiffonniers de la ville. Ce préjudice causé à la Défense
nationale est passible de la juridiction militaire.
Septembre
Encore une distinction.
Le
lieutenant-trésorier de l'École, M. David, vient de recevoir la Légion
d'honneur et la Croix de guerre. Il a été grièvement blessé au cours d'un
combat au cours duquel
"
il se battit comme un lion."
Le
journal lui adresse ses très respectueuses félicitations.
Lire
le compte rendu de cette manifestation en annexe.
Nouveau changement à la tête des écoles
militaires andelysiennes.
Le
commandant Forcinal, compatriote gisorien, un des grands mutilés de guerre,
vient de prendre le commandement de l'École des Andelys, le commandant Gay
conservant le commandement de l'École de Montreuil.
Une cérémonie émouvante.
L'Impartial
du 20 septembre relate la cérémonie du dimanche précédent, une de ces
nombreuses cérémonies qui ont jalonnées les années de la Grande Guerre. Le compte rendu est
annexé à la présente chronique.
De la viande congelée.
Lors
de l'adjudication de viande fraîche destinée à l'École militaire il est fait
mention de viande congelée.
Octobre
Une nouvelle distinction et des nouveaux
arrivants.
Le
commandant Forcinal reçoit la rosette d'Officier de la Légion d'honneur.
Compte
rendu d'une cérémonie sous le commandement du chef de bataillon Forcinal au
cimetière du Grand Andely au carré de l'École militaire puis sur les tombes des
soldats sis au cimetière du Petit Andely.
Compte
rendu en annexe.
Arrivée
des premiers prisonniers allemands qui sont affectés au ramassage des
betteraves.
Lettre d'un brave.
Le 23
octobre 1915, dans la tranchée.
«
Mon régiment avait été désigné pour prendre part à la fête. Nous devions
enlever le Bois S.... . Le choc fût effrayant. Les journées terribles, mais
glorieuses.
Pendant
trois jours, sans discontinuer, nos inlassables artilleurs firent une savante
et minutieuse préparation. Nous étions complètement abasourdis ; impossible de
s’entendre parler à voix haute ; il fallait crier pour arriver à se faire
comprendre.
Enfin,
le jour solennel est arrivé. L’attaque doit se déclencher à 9h15.
Accroupis
dans leurs tranchées, nos poilus, anxieux, frémissants, attendent l’heure fixée
pour bondir.
Le
moment décisif est arrivé. A l’heure réglementaire, les tirailleurs surgissant
de leurs trous de taupe, nous précèdent. Nous nous élançons, ensuite, la
baïonnette haute, menaçante, la rage au coeur ; la vague alors se forme et se
précipite au pas de course vers le repaire des bandits ; c’est une ruée
magnifique, irrésistible. Les Boches, surpris, tirent à peine quelques coups de
fusil ; le choc est rapide et sauvage. La joyeuse et terrible Rosalie
s’enfonce, jusqu’à la croisière, dans la poitrine de tous les lâches occupants
de la tranchée, qui, se voyant perdus, cherchent à nous apitoyer sur leur sort
en braillant comme des ânes, leur traditionnel « Kamrad, Kamrad.» Nous ne
déchargeons même pas nos magasins : tirer cela prend du temps ; les grenades à
main, à leur tour, entrent en danse. Habilement lancées par nos nettoyeurs de
tranchées, elles voltigent au dessus des boches et les pulvérisent. La vue du sang qui coule à flots nous enivre,
la fièvre nous agite, et taillandant à droite et à gauche, nous voulons en
finir au plus vite à cet endroit. C’est une vraie boucherie et nous piétinons
un vrai charnier humain.
Peu
importe, il faut encore pousser de l’avant car il reste une tranchée à prendre.
Nous nous élançons, pour la seconde fois, la baïonnette, encore rougissante,
les mains en sang à l’attaque de la tranchée désignée, qui balayée par notre
artillerie d’abord, tomba facilement entre nos mains.
Les
autres vagues de renfort, sorties à intervalles réguliers, complètent l’ouvrage
et emploient le reste du jour à nettoyer le bois de ses derniers défenseurs.
Après ce terrible effort, le bois S.... est à nous : plus de 500 prisonniers,
10 minenwerfers, 15 mitrailleuses, des armes, des munitions et un matériel de
toute sorte, étaient tombés entre nos mains.
Pour
ce brillant exploit, le général C.... commandant la division marocaine, à
laquelle nous étions rattachées pour l’attaque, a cité le 247e à
l’ordre de la division et notre drapeau a été décoré de la Croix de guerre.
J’ai,
en plus, la grande joie de vous annoncer, que pour ma conduite au feu pendant
ces terribles journées, 25, 26, 27 et 28 septembre, je viens d’être l’objet
d’une « Citation à l’ordre de l’Armée» ; cela fait ma deuxième citation.
Le
général m’a décoré de la « Croix de guerre avec palme» et après m’avoir donné
l’accolade, m’a chaudement félicité.
Voilà,
cher Monsieur, le résumé succinct des glorieux combats, auxquels j’ai eu
l’honneur de prendre part, tout dernièrement.
Je
m’en suis tiré sans une égratignure.
Le
moral reste toujours excellent ; on les aura.»
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