1951 (1) : Prise d'armes et remise de décorations, le bal de l'école militaire, terrain militaire interdit, la fête de la Victoire, décès du lieutenant Paulmier, deux visites à l'école, fêtes de fin d'année, exposition de peintres, obsèques du lieutenant Paulmier, inauguration de la salle des fêtes, une légion d'honeur à l'EMP, AET, arriver en travaillant.

Janvier

Prise d'armes et remise de décorations à l'École militaire des Andelys.
Dimanche matin, à 11 heures, une prise d'armes s'est déroulée à l'École militaire des Andelys, à l'occasion de la remise de plusieurs Médailles militaires.
Les compagnies s'échelonnaient impeccablement dans la vaste cour, en présence des officiers et des professeurs de l'École.
Après le salut au drapeau, M. le chef de Bataillon Frédet, commandant l'École, passa les élèves en revue.
Puis s'avancèrent au premier rang avec leur drapeau, les membres de la section des Médaillés militaires des Andelys qui, sous la conduite de leur président, M. Caronnet, étaient venus spécialement assister à la décoration de quatre nouveaux promotionnaires : l'adjudant-chef Guillerault et l'adjudant-chef Parmentier de l'École militaire, le sergent-chef Leroy, qui a quitté l'École depuis peu et le brigadier de Police municipale Dandelot, qui, il n'y a pas très longtemps, a fini sa carrière comme adjudant-chef à cette même École militaire où il avait demandé à venir recevoir sa décoration.
Le commandant Frédet, au nom du Président de la République, décora successivement les quatre récipiendaires très émus et les félicita chaleureusement.
La cérémonie pris fin sur le défilé de l'École, musique éclatant, en présence des nouveaux décorés.
Un apéritif fut ensuite servi au mess en l'honneur des nouveaux médaillés et de leurs familles.
Le commandant Frédet leur adressa des compliments excellemment tournés et profita de cette réunion amicale pour féliciter l'ex-adjudant Marie, promu sous-lieutenant depuis le premier janvier, le capitaine Simon qui figure au tableau d'avancement pour le grade de chef de bataillon et l'adjudant Mongy pour le grade de sous-lieutenant.
Enfin, il adressa ses souhaits de bienvenue au capitaine Tadeï, officier nouvellement arrivé à l'École, retour d'Indochine où il a fait une prestigieuse campagne qui lui a valu une moisson de décorations dont la Légion d'honneur pour faits de guerre. Il fut en effet le premier à entrer dans le palais de Bao-Daï, reconquis.
Le commandant Frédet salua également un nouveau professeur de l'École militaire et littérateur de talent qui vient de concourir pour le prix Goncourt.
Monsieur Maillac, professeur principal, intervint avec à-propos pour combler une omission volontaire du commandant Frédet qui n'avait pas dit qu'il figurait au tableau d'avancement pour le grade de lieutenant-colonel.
Alors que ce terminait cette manifestation à ajouter aux annales de l'École, on appris que cette année, le très classique et très recherché bal des sous-officiers de l'École militaire, prendrait un développement et une ampleur beaucoup plus grande.
Il deviendra le grand événement mondain de la région et sa date est fixée au 8 juillet.

Le bal de l'École militaire.
Continuant la tradition du bal des sous-officiers de l'École militaire préparatoire des Andelys aura lieu le samedi 3 février, sous la présidence du général de corps d'armée Devinck, commandant la 1ère région militaire.

L'Impartial du 13 janvier 1951


Février

Et voici le bal de l'École militaire préparatoire des Andelys.
Le chef de bataillon Fredet, commandant l'École militaire préparatoire des Andelys, les cadres civils et militaires, seront heureux d'accueillir, samedi 3 février 1951, à 22 h. tous les amis de l'École, à l'occasion du bal organisé au profit de la caisse de secours des élèves et de l'hospice des Andelys.
Monsieur le général de corps d'armée Dewinck, commandant la 1ère région militaire, a bien voulu accepter la présidence effective de cette manifestation, dont l'objet est tout à la fois de remercier ceux qui, tout au long de l'année, moralement ou matériellement, aident le commandant de l'École dans la tâche d'éducation et d'instruction qu'il a entreprise, et d'amener une compréhension plus amicale entre la population andelysienne et les élèves et les cadres de l'École.
C'est dans ce double but que tout le monde, à l'École, a travaillé avec ardeur. Le succès de la fête, la satisfaction des invités sera une grande joie pour tous.
Le comité des fêtes de l'E.M.P. s'adressa une fois de plus à vous, chers amis des Andelys.
Nous vous avons indiqué, la semaine dernière, que les invitations étaient distribuées, et que nous craignions d'avoir commis de nombreux oublis : nous en avons déjà réparé quelques-uns. Nous demandons encore une fois instamment à ceux que nous n'avons pas encore touchés, de se faire connaître soit directement au secrétariat de l'École, soit aux cadres civils et militaires.
Un certain nombre d'Andelysiens nous ont demandé si la tenue de soirée était obligatoire : nous vous rappelons qu'il est précisé sur nos invitations : « Tenue de soirée ou de ville ». A votre choix ! À votre goût ! A votre fantaisie !
Parmi nos attractions (n'oubliez pas la « lumière noire »), nous vous signalons un cotillon, que nous avons choisi s'harmonisant avec l'ambiance « Outre-Mer ».
Nous informons ceux qui se rendront à l'École en voiture particulière, que nous avons prévu un parc gardé.
Mais nous avons également organisé un service de cars entre le Petit-Andely et l'École. (Transport gratuit).
Départs : du Petit-Andely, place Saint-Sauveur à :  21 h. 45, 22 h. 15, 23 h. 30.
Arrêts : Hôtel de la gare, place N. Poussin ( en face du panneau d'horaire des cars).
Pour le retour, départs de l'École à : 2 H., 3 h., 4 h., 5 h.
A samedi !!!

L'Impartial du 3 février 1951.


Avril

Terrain militaire interdit.
Par décret en date du 15 mars 1950, le ministre de la Défense nationale a déclaré d'utilité publique et urgente l'acquisition par le département de la Défense nationale de la parcelle de terrain, située aux Andelys (Eure) lieudit « Les Planches ».
Ce terrain ayant été affecté à l'École militaire préparatoire le 30 mars dernier, pour y implanter son terrain de sport.
Il est formellement interdit d'y pénétrer et d'y déposer des ordures et débris de toutes sortes, sous peine d'amende.

L'Impartial 14 avril 1951.


Mai

La fête de la Victoire.
Une remise de décorations marquera aux Andelys les fêtes de la Victoire dimanche 6 mai 1951.
Nous rappelons les principaux points du programme de l'anniversaire de la Victoire du 8 mai 1945, qui sera célébrée dimanche prochain 6 mai, aux Andelys.
A 7 h., réveil en fanfare par les tambours et clairons du corps des sapeurs-pompiers ;
A 9 h. à l'église Notre-Dame : messe solennelle de la Victoire et de la Paix ;
A 10 h 45, place Poussin :  revue, prise d'armes et remise de décorations.
Ces remises de décorations sont les suivantes :
1er Par M. le commandant du bataillon de l'air 1-122, de Chartres, la remise de la croix de chevalier de la Légion d'honneur, au fils du lieutenant Paulmier.
Cet enfant, âgé de 1à ans, recevra la croix décernée à son père à titre posthume, après sa mort en avion à Bamako, en septembre 1950. Le corps de cet officier sera ramené à Gaillon très prochainement.
Le lieutenant Paulmier était un ancien élève de l'École militaire préparatoire des Andelys. Sur la monument aux morts de l'École, figurent déjà les noms de ses deux frères. C'est donc le troisième fils Paulmier qui donne sa vie pour la France et la cérémonie de dimanche revêtira en conséquence un aspect particulièrement émouvant pour l'enfant et la veuve du lieutenant Paulmier, mais aussi pour la vieille maman qui sera présente.
2ème Par M. le lieutenant-colonel Fredet, commandant l'E.M.P. des Andelys, la remise de le croix de chevalier de la Légion d'honneur à M. Masinski Konstanti, demeurant à Radeval, ex-caporal-chef au 2ème R.I. Polonais, mutilé de la guerre 39-45. A été grièvement blessé le 17 juin 1940, par un éclat d'obus et par balle, à son poste de combat de La Garde.
A 10 h 30, départ pour le monument aux morts.
A 10 h 45, manifestation au monument aux morts, dépôt de gerbes. Défilé par l'École militaire
A 22 h, terrai Hamelin : grand bal de nuit public et gratuit. Illuminations.
Le maire invite les habitants à pavoiser et à illuminer la façade de leurs maisons.
Le Maire. Ch . Cruchon.

L'Impartial du 5 mai 1951.


Décès du Lieutenant Paulmier.
A l'occasion des fêtes de la Victoire, l'École des Andelys a été présentée par le colonel Fredet au représentant du Gouvernement et la Croix de la Légion d'honneur a été remise au fils de notre camarade Paulmier (A.E.T. des Andelys), mort en service commandé aérien.
A été lue la citation suivante:
“ Lieutenant Paulmier (Albert, Louis), escadrille Outre-Mer 81.
Officier mécanicien radiotélégraphiste de grande valeur. Commandant du centre de transmission et de la zone de Bamako. D'une conscience professionnelle digne d'éloge. Avait toujours fait preuve d'un dévouement absolu, en particulier lors des recherches d'avions en détresse.
A trouvé la mort en service aérien commandé à Kabarata-Signal en A.O.F., le 29 septembre 1950, alors qu'il venait d'exécuter le réglage-gonio de Labé”.

Le Journal des A.E.T. Juillet 1951.



Juillet

Deux visites à l'Ecole.
A signaler deux visites d'A.E.T. à l'École: celle du capitaine de gendarmerie Deboudl Guy, A.E.T. (Les Andelys 29-34), et celle de Corvest Jean, A.E.T. (Tulle).


Fêtes de fin d'année.
Dimanche 8 juillet, fête de l'École, sous la présidence du général Devaux, directeur du personnel militaire de l'armée de terre.
10 h 30, Prise d'armes :
a) Remise des insignes de la Légion d'honneur à M. Dubois, professeur honoraire des E.M.P.
b) Baptême de la promotion du sous-lieutenant Braud
A partir de 14 h 30 : kermesse suivie d'un apéritif-concert.
20 h 30, inauguration de la salle des fêtes de l'École militaire.
Lundi 9 juillet, à 10h. distribution solennelle des prix, sous la présidence du général Adeline, directeur régional du Génie.
A 21 h. bal de séparation de la “Promotion de la 2ème palme”.
Samedi 14 juillet, Fête nationale.

L'Impartial 7 juillet 1951.


Exposition des peintres de la région Andely-Seine.
Le vernissage de cette belle exposition régionale aura lieu le dimanche 22 juillet à 15 heures ainsi que nous vous l'avions déjà annoncé.
Parmi les peintres de la région qui ont envoyé des œuvres à cette manifestation annuelle notons : Mesdames Monique Le Bret, Collas-Primer, Chefneux, Marthe Lucas, MM. Gonet, Sautin, Yvan Parrault, Labbé, Edgard Parrault, Montané, Kovac, etc.
Une nouvelle fois la belle salle des cantines scolaires s'avérera trop petite.
L'exposition restera ouverte jusqu'au 2 septembre.

L'Impartial  du 21 juillet 1951.


Ses obsèques.
Comme nous l'avions annoncé la semaine dernière, les obsèques du lieutenant Albert Paulmier, ancien élève de l'E.M.P. des Andelys, se sont déroulées à Gaillon, le vendredi 27 août.
La salle du conseil municipal ayant été transformée en chapelle ardente, la levée du corps eu lieu à la mairie en présence d'une foule de personnalités civiles et militaires, parmi lesquelles nous avons reconnu M. Feuilloley, sous-préfet des Andelys ; M. Ruffier, conseiller général ; M. Jeffriau, maire de Gaillon ; M. l'adjudant Bléhaut, commandant la brigade de gendarmerie de Gaillon ; les officiers et les sous-officiers de la base aérienne de Chartres, officiers et aspirants de la base aérienne d'Auxerre, officiers et sous-officiers de l'École militaire préparatoire des Andelys, sous-officiers de Vernon. Le piquet d'honneur était composé de huit hommes de la base aérienne de Chartres.
Monsieur Aubert, curé d'Aubevoye, officia la cérémonie religieuse, à laquelle assistèrent de nombreuses personnalités appartenant aux diverses sociétés locales, anciens combattants, “ceux de Verdun”, “Rhin et Danube”, etc.
Un détachement des pompiers volontaires de Gaillon en tête, suivi par les représentants des sociétés et leurs drapeaux précédaient le véhicule funèbre, à la suite duquel marchait un sous-officier portant sur un coussin les décorations du disparu. Les personnalités officielles venaient ensuite précédent la famille et une foule d'amis accompagnant le défunt à sa dernière demeure.
Le convoi fit halte au monument aux morts et M. Ruffier, conseiller général, ancien élève de l'École militaire des Andelys, prononça une vibrante allocution funèbre. Après avoir retracé la carrière et la mort en service commandé du lieutenant Paulmier, M. Ruffier rappela toute la phalange de héros que l'École militaire des Andelys a donné à la Patrie, et il présenta les condoléances de toute l'E.M.P. à la famille.

L'Impartial 1 septembre 1951.

Son fils Claude Paulmier, élève à l'E.M.P. des Andelys, nous a déclaré lors de la préparation de l'inauguration des stèles complémentaires au monument aux morts de l'École, que le corps de son père n'avait jamais été retrouvé. La découverte en a été faite par sa veuve et sa mère lors d'une opération de réduction au cimetière de Gaillon. Le cercueil ne contenait que des morceaux de bois.


Une inauguration de la salle des fêtes.
Le lieutenant-colonel, commandant l’École invite les andelysiens à assister à l'inauguration de la nouvelle salle des fêtes de l’École militaire.
Les murs de l’ancienne salle des fêtes s’étaient effondré, soufflés par les bombes allemandes en juin 1940.
Une équipe, menée par M. E. Parrault, s’est attelée à relever ces ruines.
« par d’ingénieux moyens de fortune procurés souvent par des bonnes volontés des intéressés, par le travail acharné d’ouvriers et de soldats qui ont donné sans compter leur temps et leur cœur, c’est une salle moderne qui est réalisée et qui sera inaugurée ».
Invitation éditée par l’EMP.

Une légion d’honneur à l’EMP des Andelys.
Le dimanche 16 décembre avait lieu à l’École Militaire des Andelys une prise d’armes à l’occasion de la remise de la Légion d’honneur à un héros de la guerre 1914-1918 et résistant authentique, donc modeste, de la dernière guerre.
Devant les élèves de l’École, formés en carré, et les cadres militaires et civils de l’École, M. le lieutenant-colonel Frédet, commandant de l’E.M.P. remit au nouveau légionnaire, la Croix de chevalier de la Légion d’honneur qui lui avait été offerte pas ses fils.
Dans une allocuton virile, le colonel Frédet cita en exemple M. Lévy, aux élèves de l’École.
Lecture fut donnée de plusieurs citations dont fut l’objet le sergent-major Lévy, du 17ème bataillon de chasseurs à pieds.
L’une d’elles, suffira à juger celui auquel elles furent décernées :
« Sous-officier très brave et d’un grand dévouement, le 8 novembre 1918, a secondé efficacement le commandant de l’avant-garde du bataillon, près duquel il était attaché comme chef de groupe de liaison. Alors que le groupe se trouvait engagé contre un ennemi plusieurs fois supérieur en nombre, a traversé un terrain battu par de nombreuses mitrailleuses, pour porter lui-même les ordres aux compagnies du gros de l’avant-garde. A guidé la section envoyée en renfort et est revenu aussitôt prendre sa place au combat ».
Monsieur Paul Lévy est né à Paris, le 2 juillet 1893. Caissier à la Société générale jusqu’à l’âge de 22 ans, M. Lévy entra à la SNCF comme employé à la gare de Pont-Audemer. De 1935 à 1943, il fut sous-chef de gare au Havre, où il subit les bombardements, et fut chef de gare de Gaillon-Aubevoye de 1943 à 1948, date à laquelle il prit sa retraite et vint s’établir aux Andelys ou Mme Lévy, institutrice, prenait sa retraite l’année suivante.
Monsieur Lévy, à la suite de sa conduite héroïque durant la première guerre mondiale se vit décerner la Médaille militaire te la Croix de guerre 1914-1918.


Arriver en travaillant.
A.E.T. ! Ces trois lettres éclairent notre route d'une pleine lumière. Nous connaissons bien leur signification, souvent rappelée dans notre Journal: Arriver En Travaillant.
Que l'A.E.T. doive travailler, c'est là un axiome évident.
Ses origines modestes lui imposent, dès son enfance, une lutte tenace, permanente, qui éveille parfois de pénibles échos. Mais son éducation virile, ses obstacles franchis, ses oppositions vaincues, ses misères endurées le haussent au niveau des difficultés qu'il devra vaincre, alors que les facilités de l'existence, les plaisirs gagnés sans peine l'auraient peut-être amolli et précipité vers une lamentable déliquescence. C'est là un principe élémentaire de biologie et de psychologie : tout muscle, tout nerf, tout organe physiologique dépendant de la volonté, toute faculté mentale s'adapte à l'effort qu'on lui fait rendre et, par suite, progresse sous l'influence de l'exercice.
L'A.E.T. est ainsi tout naturellement préparé à l'effort. Il sait que toute rose à ses épines et que, s'il aime la rose, il faut qu'il en subisse les piquants. Il sait que les alouettes ne tombent pas toutes rôties et qu'on obtient rien sans peine. Il sait que la vie est une perpétuelle ascension vers les sommets et que pour monter vers l'azur, vers la lumière, il faut suer, peiner et lutter. Il sait que le succès est une conquête qui s'achète et coûte cher. C'est une conquête qui dépend de ses capacités, de son travail, et qui n'est pas une question de chance, comme on le croit souvent. Certes, la chance n'est pas niable, mais la vie n'est pas assez simple pour que la bonne fortune puisse suffire à donner le succès. La chance que nous accordons aux autres, c'est, presque toujours, les qualités qu'ils ont et que nous n'avons point. Ce sont les médiocres qui croient à la chance, et non au mérite, au talent, à la persévérance. En vérité, il n'y a qu'un moyen de croire à la chance : c'est de la créer soi-même par le travail. Le travail ne donne pas toujours le talent. Mais le talent avorte misérablement s'il n'est pas soutenu, fortifié par le travail.
L'A.E.T. appartient à toute une tradition de travail, une tradition vivante et progressive. C'est dans cette chose non figée, que nos grands anciens trouvèrent matière à s'élever, à comprendre ce que peuvent faire le mérite et la patience dans les longs efforts. Arrivés souvent aux plus hauts postes de la hiérarchie, dans tous les domaines de l'activité humaine, ils ouvrent à pleines mains les trésors de leur expérience, de leur exemple aussi ; ils prouvent qu'ils sont resté fidèles, non seulement à cet esprit d'entr'aide et de féconde fraternité qui reste la  force et l'esprit de notre association, mais aussi et surtout à cette loi du travail, aux côtés si attachants. Ils se sont faits eux-mêmes ; ils sont arrivés, comme on dit, “à la force du poignet” ; ils ont souvent suppléé aux lacunes d'une instruction négligée, se meublant le cerveau, préparant des examens, toujours stimulés par l'aiguillon d'une ardeur tenace et d'une perpétuelle soif de perfection. Ils ont aussi embelli leur vie, ouvert leur esprit, grandi leur pensée, élargi leur cœur. La lutte qu'ils ont soutenue et la volonté par là dépensée sont les moyens par lesquels on “s'accroit”. C'est une leçon dont il faut se souvenir.
L'A.E.T. ne l'oubliera pas dès sa sortie de l'école. Il a alors, trop souvent, sous les yeux des spectateurs humiliant qui provoquent l'écœurement, la révolte. Il risque de se perdre s'il témoigne d'inexcusables faiblesses : la débauche, le jeu, les femmes, l'alcool sont les dangers qui le guettent s'il va à l'oisiveté. Et lorsque un homme s'est donné de tels maîtres, il a les plus grandes difficultés à échapper ensuite à leur tyrannie. Est-ce à dire qu'il faille bannir toute espèce de plaisir ? Non pas certes, mais le plaisir ne doit être pris que dans la mesure où il est nécessaire, après le travail, à la restauration et au repos du corps et de l'esprit.
L'A.E.T. ne quitte pas son école sans se sentir ému. Des éléments d'incertitude se glissent parfois dans son esprit. Peut-être songe-t-il, tout au fond de lui-même, que certaines ambition lui sont interdites. Rien n'est plus inexact, rien n'est plus faux.
“ Vous n'avez rien à craindre parce que vous êtes pauvres, parce que vous n'avez à compter sur aucun des appoints dont profitent tant d'autres jeunes gens, parce que vous n'avez comme lot que votre tête et votre cœur ”, disait un grand A.E.T., le général d'armée Bourret, lors d'une distribution des prix aux élèves de son ancienne école, les Andelys. “ Il vaut mieux, ajoutait-il, être les parvenus du travail que d'être les parvenus d'un nom ou d'une fortune ”. Le point de départ n'a qu'une médiocre importance quand la route est longue à parcourir. Jeune engagé ou élève d'une grande école, le moyen de réussir pour l'A.E.T. frais émoulu, est toujours le même. Il a un pied sur l'échelle, il ne tient qu'à lui de grimper plus haut. Son succès dépend de lui-même s'il considère son premier emploi, si modeste soit-il, comme un tremplin d'où il prendra son élan. C'est par son travail, par sa volonté, qu'il imposera à ses chefs, à ses hommes, qu'il tendra vers les supériorités de l'intelligence et du cœur, qu'il prendra confiance en lui-même. Mais cette confiance indispensable doit bannir la fatuité.
L'A.E.T. pourrait être tenté de croire, après de brillants succès scolaires, qu'il n'a plus à se souvenir de ses origines ou qu'il n'a plus à apprendre. Qu'il se garde bien de cet écueil : il lui reste, quel qu'il soit, Polytechnicien, St-Cyrien ou jeune soldat, à peu près à tout faire. C'est seulement quand il aura parcouru de longues étapes de travail, quand il aura acquis des connaissances étendues, qu'il comprendra que beaucoup de science donne, avec humilité, le sens même de l'entr'aide. Plus il apprendra de choses nouvelles, plus il se rendra compte de la quantité infinie de celles qui lui demeurent inconnues, plus il éprouvera le besoin de tendre la main à l'ami A.E.T. moins favorisé que lui. Et c'est là la grande leçon de modestie et de solidarité que lui donne le savoir et par conséquent le travail. La modestie sied toujours au vrai mérite. 
L'A.E.T., comme tout le monde, aura ses heures de désillusion, d'amertume, de dégoût, de chagrin. Un des vieux professeurs se plaisait à comparer la vie militaire à une belle femme : “ Elle aime, disait-il, à changer de toilette : tantôt elle revêt sa longue mante couleur de pluie. Et ces jours-là, ajoutait-il, il semble que le soleil soit absent ”. La tentation vient alors, insidieuse, de tout abandonner et de s'abandonner soi-même. Mais l'A.E.T. est solide et on n'abat pas un chêne sous un coup de hache. Le temps estompe bien vite le contour de ses triste souvenirs et c'est encore le travail qui lui remet le sourire sur les lèvres et le mène à la sagesse.
La conclusion de tout cela : Au travail ! Pour rester fidèles à notre vieille devise : “ Arriver En Travaillant ”.
Gabriel BONNET


Le journal des AET, décembre 1951.

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